Le résultat du second tour de l’élection législative accorde, suivant les décomptes, entre 131 et 142 députés pour la NUPES, coalition LFI-EELV-PCF-PS. Un cartel qui aura donc montré une (très) relative efficacité électorale mais qui se solde par un échec politique. En réalité, la gauche, phagocytée par le camp Mélenchon, est en crise.
L’alliance électorale des quatre principaux partis de gauche devait permettre de remobiliser l’électorat populaire et propulser Jean-Luc Mélenchon premier ministre en lieu et place d’Elisabeth Borne. Ce lundi, la réalité est bien différente : la participation électorale a baissé par rapport à 2017 (53,77 % d’abstention) et la NUPES n’obtient même pas la moitié des sièges nécessaires à la majorité.
Certes, le macronisme est affaibli, mais il pourra compter sur l’appoint de la droite traditionnelle pour faire passer ses réformes néolibérales — malgré des nuances de posture, l’agenda macronien est très semblable à celui du sarkozysme. L’extrême droite, elle, réalise une percée historique que personne n’a su anticiper. La bipolarisation Ensemble ! (la coalition macroniste) contre NUPES a été déjouée au profit relatif d’un troisième pôle d’extrême droite.
Les ténors de la NUPES, loin de reconnaître une part de cécité voire de responsabilité devant cette percée, ont au contraire accusé le seul camp macronien, qui n’aurait pas appelé aux barrages républicains. C’est oublier que la majorité des candidats NUPES ne l’a pas fait non plus. Et c’est fermer les yeux sur les outrances de certaines figures de la gauche qui ont écumé les plateaux télé durant la campagne — à l’exemple de la prestation particulièrement maladroite et ricanante de Sandrine Rousseau hier soir sur TF1.
Pas de « déferlante » à gauche
La gauche reste bloquée à un plus-bas historique d’environ 25 % des votants. Le fait que Jean-Luc Mélenchon ne se soit pas présenté à l’élection et renonce à un mandat de député indique d’ailleurs que lui-même ne croyait sans doute pas à la victoire de son camp. La France Insoumise pourra cependant se consoler en attirant la quasi-exclusivité des lumières médiatiques à gauche, en mettant en avant ses nouveaux élus taillés sur mesure pour le storytelling, telle la femme de chambre Rachel Kéké, victorieuse en Essonne face à l’ancienne ministre Roxana Maracineanu.
Avoir promis à tour de bras « la victoire », de façon inconsidérée au vu des rapports de force politiques globaux, ne risque-t-il pas de générer un retour de bâton ? La déception militante sera réelle à gauche, d’autant que le nombre de députés élus est en-dessous des fourchettes basses des prévisions sondagières. Dans ce contexte, alors que les troupes insoumises entonnaient des déclarations enthousiastes, Fabien Roussel est le seul à faire entendre une voix différente : « L’alliance ne parle qu’à une partie de la France, celle des villes et non celle de la ruralité ».
Le PCF parent pauvre
Au sein de la coalition, le PCF s’avère le parent pauvre. 12 petits députés, soit un de plus que lors de la législature précédente. À comparer aux 22 obtenus par le parti socialiste, dont la candidate à la présidentielle a pourtant réalisé un score inférieur à celui de Roussel. Un total largement en-deçà de celui promis par les négociateurs du parti à l’occasion de la conclusion de l’accord, lesquels répétaient que le PCF aurait « l’assurance d’avoir un groupe ». En réalité, il lui faudra compter sur l’appoint de députés ultramarins non-communistes, comme depuis 2007.
L’accord NUPES a propulsé dans toutes les périphéries ouvrières anciennement « rouges » de jeunes cadres Insoumis, privant le parti communiste de ses « fiefs » et de toute perspective de rebond. Ces nouvelles figures ont désormais un boulevard médiatique pour développer les thèmes constitutifs de LFI : luttes des minorités, féminisme victimaire, critique de la laïcité, écologisme anti-nucléaire… À moins qu’au terme d’une séquence électorale finalement peu glorieuse pour la gauche, des voix insoumises aux Insoumis osent enfin s’élever.
Maxime Cochard