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Grande-Bretagne : Un non-choix et l’ombre d’une perspective

La démission surprise de Boris Johnson en juillet dernier a rebattu une nouvelle fois les cartes de la politique intérieur du Royaume-Uni. Analyse.

S’il y a un reproche qu’on ne peut pas faire à Boris Johnson, c’est bien celui de mépriser la diversité. Il a parfaitement su s’entourer de ministres conservateurs compétents et talentueux issus des « minorités ». Ritchie Sunak est sans doute le plus emblématique d’entre eux : diplômé en philosophie, en économie et en sciences politiques, marié à l’héritière d’une des plus grandes fortunes de l’Inde, né comme Margaret Thatcher dans le Yorkshire, ce fils de médecin à l’élégance sobre offre un saisissant contraste avec le truculent et imprévisible Bojo. En parfait Machiavel, il a su attendre son heure avant de porter l’estocade à son maître et rival. 

Conservateur pur et dur, en pointe sur le soutien à l’Ukraine et le démantèlement du code du travail, il se garde toutefois d’en rajouter. Il préfère jouer la carte du sérieux et de la compétence plutôt que celle de la provocation. Il propose d’investir avant tout dans l’industrie et dans la recherche, mais aussi dans l’éducation. Le nationalisme britannique sur lequel il fait fond a toujours valorisé non seulement le commerce, mais aussi la production industrielle.

Le talon d’Achille de Ritchie, c’est sa réputation de « tax avoider », c’est-à-dire de fraudeur fiscal. L’opinion publique britannique est très sourcilleuse sur ce point, et exige des hommes politiques une réelle exemplarité. Ritchie aura tout intérêt à se disculper s’il ne veut pas voir ses ailes coupées.

Un autre danger pourrait venir de son adversaire travailliste Keir Stammer. 

L’épisode Corbyn étant désormais clos, le Labour a fait le choix de revenir à l’un de ses grands classiques : le socialisme compassionnel, dont l’origine remonte à 1883, année de la mort de Marx, mais dont le but se situe à l’opposé de toute action révolutionnaire : il s’agit de dénoncer avec véhémence les méfaits de la société de marché sans rien remettre en cause du capitalisme. Keir Stammer, avocat de profession, est capable de faire pleurer un mur de pierre quand il évoque la malnutrition des enfants pauvres, les maladies professionnelles et la misère des mal-logés, mais estime n’avoir rien d’autre à proposer que d’amener une majorité travailliste aux affaires. 

Le problème est évidemment que les électeurs britanniques ont fait depuis un quart de siècle à trois reprises l’expérience des promesses non tenues.

Le mouvement de grèves sporadiques et dispersées mais importantes qui agite actuellement le pays pourrait bien rebattre les cartes, en obligeant les uns et les autres à aller davantage sur le fond des problèmes. L’épisode ou plutôt l’intermède Johnson a considérablement discrédité les conservateurs. Pas sûr qu’entre Sunak et Stammer le choix soit stimulant pour l’électorat. 

Mais l’exaspération ambiante pourrait se traduire par un regain d’intérêt pour la gauche du Labour, qui a de forts ancrages locaux.